Nous avons découvert avec joie une initiative scolaire qui sensibilise à la fois aux enjeux de la pollution lumineuse, aux actions d’organisations poursuivant comme l’ANPCEN l’intérêt général et qui place les enfants en situation de contribuer à la loi. Un véritable apprentissage de citoyen…
Il s'agit de l'initiative des élèves de CM1-CM2 de l'école publique de Bollezeele, dans le département du Nord et l’Académie de Lille, qui nous ont fait partager leur rédaction d’une proposition de loi… à découvrir ci-dessous, ainsi que l’interview des enfants.
Un grand merci à eux pour leur attention à ces enjeux qui nous tiennent à coeur. Un travail mené sous la houlette attentive du directeur de l’école Monsieur Olivier Allais que nous remercions également vivement.
Proposition de loi
Par Baralle Chloé, Bellia Lussy, Bronquart Rose-Anna, Delautre Luca, Dheedene Alexandre, Garret Léa, Grosset-Bourbange Ethan, Kowalewski Marie, Laroye Kassandra, Laroye Simon, Lauwerie Nino, Lejeune Coline, Lescieux Nora, Mahieu Chloé, Paccou Eloïse, Penin Maëlle, Quetstroey Jade, Rouls Floryan, Tehjari Ilyes, Vandenbussche Enzo, Vermeersch Suzie. Sous la conduite de Monsieur Olivier Allais.
EXPOSE DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Dans les Flandres, comme dans d'autres territoires en France, l'éclairage lumineux nocturne est omniprésent, entraînant parfois des graves conséquences pour la faune locale.
Des espèces nocturnes telles les chauves-souris, les chouettes, les renards, les hérissons, et beaucoup d’autres méconnues, subissent les nuisances d’une lumière trop forte et constante la nuit. Nombreux sont les d’animaux qui vivent principalement la nuit (95% des papillons, 60% des invertébrés et 90% des amphibiens).
Cet effet lumineux artificiel provoque une perturbation des chaînes alimentaires (relations proies-prédateurs), la modification du cycle biologique des animaux et des plantes et la réduction des habitats (effet barrière de la lumière). La biodiversité diurne se trouve, elle aussi, concernée.
Entre 1992 et 2012, l’Association Nationale pour la Protection du Ciel et de l’Environnement Nocturnes (ANPCEN) a constaté, en France, une augmentation de plus de 89% de points lumineux.
Pourtant des lois ont sensibilisé l’opinion publique à la préservation de la biodiversité nocturne. La loi Grenelle du 3 août 2009, évoque des mesures de prévention, de suppression ou de limitation de la lumière artificielle causant un trouble excessif aux personnes, à la faune, à la flore ou aux écosystèmes. L’arrêté ministériel du 1er juillet 2013 impose, lui, d’éteindre les façades, les vitrines et les bureaux, au plus tard à une heure du matin. La loi du 8 août 2016 sur la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, a mis en évidence clairement la reconnaissance des paysages nocturnes, les décrivant comme « Patrimoine de la Nation » devant être protégés par tous !
Mesdames, Messieurs, nous devons sensibiliser l'ensemble de la population en (re)découvrant l’environnement nocturne pour mieux le respecter. Il faut également inciter les communes à poursuivre leur action pour limiter la quantité de lumière émise la nuit , tout en suivant les résultats. Il faut encourager les efforts en donnant des conseils aux communes. Pour celles qui ont décidé de réduire leur éclairage et qui ont reçu le label « villes et villages étoilés », les pouvoirs publics doivent les soutenir.
Tels sont les objectifs de la proposition de loi que nous vous demandons d’adopter.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
Les collectivités territoriales doivent réduire leur éclairage de 5% par an à partir du 1er janvier 2019 pour arriver à une réduction de 35 % en 2025. Un rapport annuel doit être remis à l'Assemblée Nationale pour contrôler les efforts.
Article 2
Un Plan National doit être créé pour réduire et pour supprimer les nuisances lumineuses.
Article 3
Il faut mettre en valeur les communes ayant reçu le label « villes et villages étoilés » et les encourager à poursuivre leurs efforts de réduction de l'éclairage nocturne par une dotation de l'Etat.
Interview de la classe de CM1-CM2 de Bollezeele
ANPCEN : Pourquoi avez-vous choisi la pollution lumineuse ?
★ Elèves de CM1-CM2 de l'école de Bollezeele : On s'est rendu compte en lisant des documentaires qu'il y avait beaucoup d'animaux nocturnes en danger : des papillons de nuit, des hiboux, des chauves-souris, des blaireaux...
C'est une biodiversité invisible et silencieuse qu'il faut protéger. Dans les Flandres, on en croise quelques fois (des chauves-souris dans les maisons abandonnées, des hérissons sous les haies des jardins...). Elle fait partie de notre environnement et notre territoire.
Notre inscription au « parlement des enfants » cette année nous a permis de réfléchir sur la manière de protéger ces animaux nocturnes : réduire l'intensité des lumières dans les villages et les villes de France.
ANPCEN : Est-ce que la qualité de la nuit est importante pour vous ?
★ Elèves de CM1-CM2 de l'école de Bollezeele : Bien sûr. Pour notre sommeil, la nuit noire est importante. On peut mieux se reposer et donc mieux apprendre à l'école. Comme ça, on évite d'être de mauvaise humeur ! Pour les animaux qui vivent le jour, c'est pareil. Pour les animaux nocturnes, la lumière peut les empêcher de chasser, de se nourrir, de se déplacer... donc de vivre. C'est grave !
ANPCEN : Y a t-il une augmentation de l'éclairage artificiel autour de vous ?
★ Elèves de CM1-CM2 de l'école de Bollezeele : Notre village est situé sur une petite colline qui nous permet de voir à plusieurs kilomètres à la ronde, notamment vers Dunkerque. La nuit, dans cette direction, tout est de couleur orange. Autour de nous, des magasins restent allumés une bonne partie la nuit, malgré l'arrêté de 2013 sur l'extinction des lumières des vitrines... On est trop jeune pour voir une augmentation mais on constate qu'il y a trop de lumière la nuit !
ANPCEN : Que vous inspire la nuit ? Avez-vous un beau souvenir de nuit étoilée ?
★ Elèves de CM1-CM2 de l'école de Bollezeele : La nuit à la campagne, c’est le grand silence, le calme et le repos. Elle ne nous fait pas peur. En plus, à l’œil nu on remarque la lune, des constellations et la voie lactée. Avec un télescope, on peut mieux observer certaines planètes comme Saturne, Mars et Jupiter. Rose-Anna se souvient d’avoir vu passer 6 étoiles filantes à la suite, une nuit. Le grand-père de Marie, ancien marin, lui a appris un soir à se repérer grâce aux étoiles. On a tous de beaux souvenirs comme ça.
ANPCEN : Que pensez-vous faire pour qu'il y ait moins de pollution lumineuse ?
★ Elèves de CM1-CM2 de l'école de Bollezeele : A la maison, on doit avoir le réflexe d’éteindre les lumières qui sont sur les façades : les décorations de Noël, les spots des terrasses, les lumières des vérandas, les projecteurs dans les jardins…
Monsieur le Maire souhaite organiser un conseil municipal des enfants pour entendre nos idées sur la vie dans le village. On pourra alors lui proposer d’obtenir le label « villes et villages étoilés ». On en serait très fier !
Nous avons une autre idée : demander aux écoles voisines de proposer à leur maire la même chose ! Pour les sensibiliser, on fabriquerait des affiches sur la flore et la faune nocturnes des Flandres. Mais pour recueillir des informations, nous avons besoin de scientifiques qui connaissent la biodiversité nocturne locale et viennent nous en parler !
Vous pouvez compter sur nous pour défendre la nature qui a besoin de l’obscurité pour exister !
Slogan de la classe de CM1-CM2 de l'école de Bollezeele : « Rejoignez le côté obscur de la biodiversité »