66 millions de personnes, 36 000 communes et tous les milieux naturels sont concernés par la pollution lumineuse, toutes les nuits ! Elle a des impacts mesurables sur la biodiversité, sur le sommeil et la santé humaine, sur la consommation d’énergie, sur les dépenses publiques, sur l’observation du ciel étoilé pour tous, à proximité de chez soi.
L'ANPCEN a réalisé un suivi des tendances de l'éclairage public et publie une carte de la qualité de la nuit en France montrant que celle-ci est globalement moyenne à médiocre partout hormis quelques zones peu habitées.
L'occasion d'interroger le gouvernement : une politique construite de réduction des nuisances lumineuses, avec une approche globale, existe-t-elle ? Si les nuisances lumineuses sont reconnues par la loi depuis 2009, par la loi de 2010, dans la loi de transition énergétique de 2015 et dans la loi de reconquête de la biodiversité votée en 2016... malgré de premières avancées institutionnelles, louables en France, et des pratiques locales qui commencent à changer, il n’existe toujours pas d’objectif national chiffré de progrès, pas de plan d’actions organisé, aucun outil public de mesure et indicateur. De plus, la recherche d’efficacité énergétique est souvent confondue, à tort, avec une politique de réduction des nuisances lumineuses et la confusion entre énergie et lumière règne. Ainsi on peut constater qu'en de nombreux endroits certains de ceux qui veulent économiser des kWh émettent toujours plus de lumière !
Pour contribuer à l’élaboration d’une politique française réelle, construite et globale de « prévention, limitation, suppression des nuisances lumineuses », l’ANPCEN propose désormais au Gouvernement :
- des objectifs inspirés des trajectoires des politiques énergie ou climat en facteur 2 et 4 ainsi qu'un indicateur de suivi réel des évolutions (graphique Anpcen)
- des principes pour i"nventer l'éclairage du 21ème siècle" : manifeste Anpcen, inventons l'éclairage du 21ème siècle
- ainsi que des outils cartographiques originaux de suivi de l'état de la pollution lumineuse et des extinctions pratiquées par les communes.
L'ANPCEN propose également aux citoyens des outils de participation interactive pour tout le territoire.
Une attente très longue : Sous l'impulsion de l'ANPCEN qui contribue fortement et de manière continue au cadre national nécessaire à la reconnaissance, dans tous ses aspects, d'un enjeu orphelin, une loi de 2009 indiquait que la « prévention, la limitation et la suppression des nuisances lumineuses devaient faire l’objet de mesures ». Une première réglementation limite en théorie depuis 2012 la durée d'éclairement des enseignes lumineuses, mais elle n'a jamais été appliquée, encore moins vérifiée. Puis de même en 2013, une 1ère règlementation limite les durées d’éclairement superflues pour les façades, vitrines et bureaux non occupés en milieu de nuit et relie réduction des nuisances lumineuses et des consommations d'énergie. Pour les conséquences sur la biodiversité, la pollution lumineuse est également désormais inscrite depuis 2014 dans les orientations générales de la trame verte et bleue, pour les enjeux de continuités écologiques. Depuis juillet 2015, la nouvelle loi pour la transition énergétique, renforce, avec la proposition faite par l’ANPCEN, la nécessité « d’exemplarité environnementale et énergétique de l’éclairage public », et sa prise en compte dans « un volet spécifique des Plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET) ». Depuis juillet 2016, les paysages nocturnes sont reconnus comme "patrimoine commun de la nation" et est inscrit le "devoir pour tous" de protéger l'environnement nocturne. Aussi la construction progressive du cadre institutionnel, en cours depuis plusieurs années, nécessite-t-elle sa traduction désormais dans un plan construit d’actions globales et cohérentes, avec des objectifs simples et clairs.
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Découvrez les enseignements des trajectoires suivies depuis 1960 et nos propositions d'objectifs de réduction
Chiffres-clé :
+ 94 % de lumière émise en France en 20 ans
+ 89 % de points lumineux... pour le seul éclairage public
auquel il faut rajouter toutes les autres sources lumineuses : enseignes et publicités lumineuses, façades, vitrines, bureaux non occupés éclairés, illuminations, éclairages permanents de parkings vides ou fermés, sites privés, etc...
Graphique Anpcen@
Trop de confusion entre énergie et lumière !
Pour la première fois, les courbes d’énergie consommée (bleue) et de lumière artificielle nocturne émise (verte) sont représentées de manière distincte. On voit ainsi qu'elle ne suivent pas les mêmes trajectoires. La courbe de la lumière semble toujours sans aucune limite.
Pour "prévenir, limiter, supprimer les nuisances lumineuses", objectif inscrit dans la loi, il est essentiel de ne pas confondre énergie et lumière et ne pas oublier la nécessité d'agir sur la courbe d'évolution de la lumière, tant dans les politiques publiques qu'à travers actions et choix locaux.
En effet, la prescription visant la seule recherche "d'efficacité énergétique" n'engendre pas nécessairement la réduction de la quantité globale de lumière émise la nuit, source de nuisances lumineuses. Il est même constaté bien des exemples contraires : parce que la consommation est moindre, on éclaire davantage !
Observez la courbe bleue : On constate une relative stabilisation de la consommation énergétique liée à l'éclairage public, depuis 2005, principalement due à la réduction de durées d'éclairement en milieu de nuit, mesure qui s'apparente beaucoup plus à "la sobriété énergétique" par les usages et les mesures de bon sens. Celle-ci est désormais inscrite à part entière dans les objectifs de la loi de transition énergétique. Cette stabilisation relative n’est que partiellement due à la recherche "d'efficacité énergétique" au regard de très lourds investissements effectués pourtant par les communes, et, lorsque l'augmentation de l'efficacité lumineuse des sources engendre bien une baisse suffisante des puissances électriques installées.
Observez la courbe verte et la courbe rouge : la courbe (verte) tracée pour la première fois depuis 1960 à 2015, montre en revanche que la quantité de lumière artificielle émise la nuit est fortement en hausse depuis les années 80 : + 94 % entre le début des années 90 et 2012, avec un taux de croissance annuel moyen de 3,3% en France depuis 1992. Elle traduit en partie l’extension continue du parc d’éclairage public (courbe rouge) qui compterait désormais 11 millions de points lumineux, soit + 89 % entre 1992 et 2012, dans beaucoup de communes françaises, (rythme plus de deux fois plus important que le taux d’artificialisation des sols). Elle traduit également l’augmentation importante des durées d’éclairements à partir des années 1980, ainsi que la faible réduction des puissances installées, au regard des gains techniques de rendement lumineux.
Observez la courbe orange : Comme l'ANPCEN l'a montré dans l'étude MEB-ANCPEN juillet 2015, “Eclairage du 21ème siècle et biodiversité”, la lumière artificielle nocturne n'est conçue que de manière anthropique. Ainsi, elle ignore à ce jour la fragmentation des milieux par la lumière, les besoins et les comportements la nuit des êtres vivants de la biodiversité, comme les caractéristiques de leur vision spécifique. Pourtant la perception de la lumière est très différente entre humains et espèces vivantes, vivant sur les mêmes territoires.
Aussi pour faire progresser la réflexion et l’action, l’ANPCEN propose une première estimation moyenne de la visualisation de la lumière artificielle nocturne, par les espèces basée sur la proportion de sources lumineuses à base de lumière blanche parmi les points lumineux du parc et l’écart de perception en moyenne entre sources lumineuses blanches et lampes à lumière jaune-orangé, pour une puissance lumineuse donnée. Ce travail exploratoire devra être affiné, selon les particularités des espèces et différents paramètres, en tenant compte notamment des indications fournies dans l’étude MEB-ANPCEN 2015.
Formuler des objectifs de politique publique
Nommer un sujet ne suffit pas à conduire une action progressant dans le bon sens !
Aussi l'ANPCEN, pour construire une politique réelle de progrès mesurés, propose au Gouvernement des objectifs de réduction, inspirés de la trajectoire des politiques publiques climat ou énergie définies en facteur 2 à 2025 ou 4 à 2050. (courbes en pointillés sur le graphique ANPCEN).
A fixer, suivre et mesurer. Seul moyen de respecter réellement la loi établissant la nécessité pour tous de "prévenir, limiter, supprimer les nuisances lumineuses".
Avec un indicateur de suivi des trajectoires observées de 1960 à 2015, des objectifs proposés pour réduire les nuisances lumineuses pour les humains comme pour la biodiversité,
L'état actuel de la qualité de la nuit en France : une Cartographie-Anpcen@ inédite
Globalement médiocre à moyenne
La Cartographie-Anpcen© représente le niveau de pollution lumineuse, en 2015, visible depuis le sol en début de nuit, et intégré dans toutes les directions et non plus seulement au zénith.
L’échelle en dégradé de couleurs, du blanc au violet, décrit une qualité du ciel et de l’environnement nocturnes qualifiée de très mauvaise à maximale. Elle qualifie la qualité de la nuit de très mauvaise à maximale. Très mauvaise représente par exemple plus de 30 fois la luminance naturelle du ciel, en l'absence de lune et par ciel clair.
De très rares endroits en France sont préservés. La dominante jaune de la carte démontre que la qualité de la nuit en France, avant toute modulation de l’éclairage public, est médiocre ou au mieux moyenne dans nombre de zones urbanisées. Les agglomérations génèrent des halos lumineux perceptibles à forte distance. La diagonale du centre avec un environnement nocturne en moyenne de meilleure qualité est liée à la faible densité démographique des espaces concernés et aux effets de masquage par le relief, atténuant la perception de la pollution lumineuse des villages se trouvant dans les vallées.
La Cartographie-Anpcen permet de prendre en compte les modulations d'usages (par extinction ou réduction de puissances) en seconde partie de nuit pour quantifier les évolutions recherchées et servir d’outil de pilotage. Des cartes sur-mesure peuvent ainsi être réalisées permettant d’affiner cette nouvelle cartographie à différentes échelles territoriales.
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★ ★ ★ L'OEIL DES MEDIAS
Paru sur France 5, émission C'est à dire, interview de l'Anpcen par Axel de Tarlé : un résumé des enjeux et le témoignage d'un commandant de police expliquant qu'il n'y a aucune progression des chiffres d'intervention de police avec une extinction nocturne